Maskull Lasserre : Vertige
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Maître constructeur : Les artefacts subversifs de Maskull Lasserre
James D. Campbell, le 2 octobre 2011
Les sculptures de Maskull Lasserre couvrent et synchronisent deux ou plusieurs réalités apparemment incompossibles, et les étincelles qui volent ce faisant embrasent l'imaginaire.
En modifiant des objets apparemment banals (un couteau à viande, une hache, un piano) – par juxtaposition (le couteau fusionne à la manière de tenons et mortaises le manche et les touches d'un instrument de musique) ou par substitution matérielle (le piano se transforme, son bois familier devenant de l'acier roulé à chaud) –, Lasserre crée des hybrides homogènes et subversifs qu'il nomme « instruments de compréhension ». Conçus pour mettre en question nos contextes présomptueux, ceux-ci explosent invariablement nos idées reçues, comme si une minuscule arme nucléaire avait été projetée dans notre cerveau antérieur.
Le grand amour de la musique de Lasserre joue un rôle significatif dans sa façon de penser la sculpture au-delà des limites du présent. Ça ne serait pas une exagération de ma part de suggérer que la pratique de Lasserre en est une de « mécaniste philosophe » moderne, capable d'unir l'esprit et la main dans la fabrication d'instruments qui amènent une nouvelle compréhension et une nouvelle euphorie à l'expérience d'artefacts subversifs et tout à fait divertissants. Dans la seconde moitié du xviiie siècle, de tels fabricants se faisaient appeler « mécanicien » ou « mécaniste », ou étaient connus par les métiers qu'ils avaient appris : fabricant d'instruments de musique, constructeur de moulins, quincaillier. Attiré par des objets tels des armes, des outils, des spécimens d'histoire naturelle et des instruments de musique, Lasserre dit choisir des objets constituant d'importants matériaux source pouvant « dialoguer avec l'expérience des gens et amener leur propre histoire aux œuvres ».
Son œuvre passe de façon fluide des vestiges de ce qui vit à la représentation de ce qui ne vit plus. Une hache épouse l'apparence de vertèbres de serpent, un crâne de prédateur simien prend forme à même le bord nu d'une plinthe de bois, un instrument semblable à un violon se transforme en pistolet. Tout est façonné avec une exquise précision et est éminemment fonctionnel. Le travail de Lasserre n'est pas confiné à des dispositifs optiques ou scientifiques en tant que tels, il peut être sauvage, féroce, chargé de péril, mais la vision demeure la base de tous ses « instruments ». Mordante d'esprit, sa signature est coextensive avec une attitude profondément subversive qui met au défi les suppositions du regardeur tandis même qu'elle récolte son engagement, sa gratitude et son plaisir continus. Vu la diversité, la pure délicatesse et l'extraordinaire précision d'invention ici, on ne s'étonnera pas qu'en lui cherchant des affinités avec d'autres, ce ne sont pas les collègues artistes de Lasserre auxquels je pense – je ne le soumettrai pas outre mesure à cette taxonomie –, mais plutôt au « maître constructeur » britannique Jesse Ramsden qui, il y a plus de deux siècles, a produit un éventail déconcertant d'instruments de précision, allant de machines électriques au télescope, en passant par l'optigraphe et les moteurs de division. Bien qu'elle remonte dans le temps, cette analogie est clairement plus appropriée. Or, si je devais être contraint à trouver des antécédents canadiens à la production de Lasserre, seul le brillant et iconoclaste natif de London, Ontario Murray Favro me viendrait à l'esprit.
Je ne suggère pas pour autant que la manière de penser de Maskull Lasserre relève d'une époque antérieure; ce que je tente en fait de dire est que son travail met en question et réunit des catégories temporelles distinctes. Il est enraciné dans un passé d'invention pure, jadis glorieux mais pour ainsi dire mort; se tient à la fine pointe de l'art au présent, et s'aventure jusqu'au seuil tremblant du futur. Comme dans toute grande invention, il n'est pas ici question de datation, de citation ou de précurseurs, mais plutôt de prophétie et d'intention, de pureté formelle et de grâce modeste et, avant tout, de la naissance du nouveau.
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Maskull Lasserre est né en Alberta, au Canada en 1978. Il a passé une grande partie de son enfance en Afrique du Sud avant de revenir au Canada. Il détient un baccalauréat de l'Université Mount Allison (beaux-arts et philosophie) et une maîtrise en beaux-arts de l'Université Concordia (sculpture). Ses dessins et sculptures explorent le potentiel inattendu du quotidien à travers des allégories de la valeur, l'attente, et de l'utilité. Des éléments de nostalgie, du hasard, de l'humour et du macabre sont incorporés dans ces œuvres induisant de l'étrangeté dans le familier et provoquant de l'incertitude dans nos attentes. Lasserre a exposé à travers le Canada et aux États-Unis. Ses oeuvres se retrouvent dans les collections permanentes du gouvernement du Canada (Transports Canada, les Forces canadiennes), du Conseil des arts du Canada et de la Ville d'Ottawa. Il a également participé au Programme d'arts des Forces canadiennes (PAFC) en Afghanistan
L’artiste souhaite remercier Pamela et Monty Lasserre, Mirana Zuger, Kalessy et Colin Twigley, Jonathan Villeneuve, Dominic Pappilion, Mark Peter, Matt Thompson, Pierre-François Ouellette et le Conseil des arts et des lettres du Québec.
Maskull Lasserre : Vertige
Past exhibition