Quelques bons mots qui font encore effet, et la marée se veut une synthèse des deux séries précédentes de Dil Hildebrand. Alternant entre planéité et spatialité, cette nouvelle production reflète l'intérêt continu de l'artiste pour l'architecture et pour la peinture.
"Le titre de l’exposition est tiré d’un poème de Margaret Atwood*, dans lequel la poète énumère des éléments utiles pour exercer son métier, dont, en fin de liste, « quelques bons mots qui font encore effet, et la marée ». Équipée de vieux outils, la poète projette de larguer les amarres pour atteindre de nouveaux rivages, mais réalise que pour ce faire, elle doit suivre le courant changeant de la chance; une juste description du défi créatif. Quantité d’autres motifs imprègnent la poésie d’Atwood. L’anxiété, les épreuves du processus créateur, la relation entre l’artiste et son public, et les passages sombres – tous des sujets d’importance chez Atwood – sont des thèmes de premier plan dans cette exposition. Chaque peinture ici a pour titre un extrait d’un poème d’Atwood.
Semblables à des fenêtres, à des portes, à des vitrines et à des portiques, les toiles de cette exposition révèlent d’étroits espaces intérieurs et des surfaces riches de textures qui témoignent du long processus de fabrication de chacune des peintures. À l’aide de formes abstraites, l’artiste construit des œuvres architectoniques qui demandent d’être pénétrées du regard, bien qu’elles soient sciemment dépourvues de tout appât compositionnel donnant l’impression de sécurité qui accompagne habituellement notre envie d’entrer à quelque part. Ces œuvres sont tributaires de diverses source d’influences – la peinture doorkijkje (perspectiviste) néerlandaise, l’architecture moderne, et Matisse apparaissent tous sous différents dehors à travers l’exposition.
Si le mot « passage » fait référence à un segment de prose ou de poésie, il est aussi riche de sens au sein du langage pictural; les passages sont des motifs architecturaux courants en peinture, des ouvertures à travers lesquelles regarder, des symboles d’ambivalence, et des lieux de mouvement entre états d’âme. Ils sont aussi des sites qui unissent la sphère de la production à celle de la consommation, agissant comme un point de rencontre entre l’artiste et son public. Et dans le cas de la guillotine, le « passage » est aussi une machine de démembrement. Dans les romans gothiques, les seuils de portes sont souvent les sites de suspense, de délires et de visions étranges. Quelques bons mots qui font encore effet, et la marée est une étude de ce qui se produit dans ces espaces liminaux sans loi; le travail de la poète et du peintre, qui flotte, qui monte et descend à la merci de la marée chaotique."
- Dil Hildebrand
* « True Stories », du recueil True Stories, 1981
Dil Hildebrand est né en 1974 à Winnipeg, Canada. Il est titulaire depuis 2008 d'une maîtrise en beaux-arts de l'Université Concordia. En 2006, il a remporté le grand prix du Concours de peintures canadiennes RBC, et a depuis participé à plusieurs expositions au Canada, aux États-Unis et à l'étranger notamment la 4e Biennale internationale d'art de Pékin (2010), "Back to the Drawing Board" à YYZ Toronto (2011), la Biennale canadienne du Musée des beaux-arts du Canada (2012), "Re-configuring Abstraction" à la Manitoba University School of Art Gallery (2013), "Le Projet Peinture" à la Galerie de l'UQAM (2013), "Shape Shifters" à Herron Galleries University of Indiana (2013), "Young Canadian Painters" à Cambridge Galleries (2014), "La Beauté du geste" au Musée d'art contemporain de Montréal (2014) et "Land-reform(ed)" à la Galerie Ajagemô du Conseil des arts du Canada (2014). Ses oeuvres se retrouvent dans les collections permanentes du Musée des beaux-arts du Canada, du Musée d'art contemporain de Montréal, du Musée des beaux-arts de Montréal, de la Banque d'oeuvres d'art du Conseil des arts du Canada et de nombreuses collections corporatives dont celles de la Banque de Montréal, de la Banque Royale du Canada, de TD Canada Trust, d'Ernst and Young, de Stikeman Elliott LLP, de Bennett Jones LLP, d'Osler Hoskin & Harcourt LLP et de McCarthy Tétrault LLP. Dil Hildebrand vit et travaille à Montréal. En 2016, Plein Sud présentera une exposition solo de son travail à Longueuil.