Le paysage semble le seul endroit où se reposer du monde. Il y a les paysages que l'on contemple et dont on garde des morceaux en mémoire et ceux qu'on ne regarde pas : ceux qui défilent de chaque coté de la voiture par exemple, ceux dont l'extrême coin de l'oeil capte et fixe des fragments, qui ne sont que lignes de couleurs flous et formes étirées, tantôt abstraits tantôt narratifs.
Le paysage n'a pas besoin d'exister, il n'a besoin que d'un signe d'état, solide ou fluide, d'un plan d'espace ou une couleur. D'un rien une brèche se crée, tout resurgit et suspend l'activité du monde.
Avec la précision du chirurgien plasticien, le savoir de l'ébéniste et la compétence de l'architecte, Marie-Chrystine Landry construit des volumes à partir de bois déniché dans différents paysages et altéré par le temps. Elle en prélève l'épiderme et crée des formes qui, par accumulation de millier de petits lambeaux de peau de matériaux colorés, seront réaffectées dans de nouveaux fragments, sites monumentaux à l'échelle intime, des morceaux réparateurs en cas d'interruption ou de panne du paysage.
Issue des dernières générations de sculpteurs plasticiens, perfectionniste du métier, obligée de se défaire et de se refaire, l'artiste conserve de son apprentissage classique un doigté sûr et un tour de main précis. Rien n'échappe au maître de l'espace, ni le poids, ni les volumes, ni l'équilibre et
l'échelle. Spécialiste du grand dans l'intime, Landry récidive à travers cette nouvelle séquence d'oeuvres qui constitue l'exposition La légèreté des paysages, sa première à la galerie Pierre-François Ouellette art contemporain.
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Marie-Chrystine Landry est née à Sainte-Hélène-de-Kamouraska en 1956. Elle détient une maîtrise en arts plastiques de l'Université du Québec à Montréal. Depuis 1985, elle a participé à plusieurs expositions collectives (dont les Paysagistes en 2004, Artefact 2001 au canal de Lachine et au Festival international des jardins contemporains de Métis, en 2000) et a présenté des expositions individuelles entre autres à la Galerie du Centre culturel de l'Université de Sherbrooke, au Musée régional de Rimouski, à la galerie Verticale de Laval et à la galerie Graff. Elle a réalisé plusieurs projets dans le cadre du Programme d'intégration de l'art à l'architecture et à l'environnement. Ses oeuvres font partie de collections publiques dont celles du Prêt d'oeuvres d'art du Québec et de la Banque d'oeuvres d'art du Conseil des Arts du Canada. Marie-Chrystine Landry vit et travaille à Montréal et à Gatineau.
Karilee Fuglem, The 12 Mile, 2010, bois, écrans,
vidéos jouant en boucle et table, 63.5 x 99 x 56 cm
Karilee Fuglem : The 12 Mile
Pierre-François Ouellette art contemporain est fière de présenter la première montréalaise de la nouvelle vidéo de Karilee Fuglem The 12 Mile, en parallèle avec La légèreté des paysages, une exposition de sculpture récente de Marie-Chrystine Landry.
Twelve Mile Creek coule d'un cours rapide vers le nord, à travers Saint Catharines. Le parcours de cette rivière a été redirigé quelques fois au cours des derniers deux cents ans, afin d'accommoder diverses révisions du canal Welland. Or, dans l'ensemble, la rivière a suivi le même parcours pendant des siècles, ce qu'attestent légendes et documents historiques. Twelve Mile Creek s'est frayée un chemin jusqu'aux journaux intimes d'Elizabeth Simcoe et d'Anna Jameson, apparaît dans les histoires revisitées de Harriet Tubman et de Laura Secord, ainsi que dans les contes de figures moins connues de la région.
L'image de la vidéo est divisée en deux écrans, chacun légèrement incliné vers l'autre, de façon à ressembler à un livre ouvert posé sur une table. L'image de la rivière coule sans relâche d'abord dans une direction, puis dans l'autre, avec des moments/séquences où les courants confluent/coulent
l'un vers l'autre, sans pour autant donner l'impression d'une image miroir. Le rythme du mouvement correspond à celui de la lecture, de tourner des pages, d'un regard qui balaie. Lorsque la direction du courant est inversée, il s'effectue également un transfert dans le corps du regardeur – un petit bouleversement pour ceux d'entre nous qui sont sensibles à de tels changements dans le mouvement. The 12 Mile à été développé lors d'une residence/exposition au centre d'art de Rodman Hall à St Catharines.
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Originaire de la Colombie-Britannique, Karilee Fuglem vit à Montréal depuis 1989. Elle poursuit une pratique artistique sciemment réceptive aux subtilités de la communication non verbale qui module la vie dans une ville bilingue. Réalisées avec du fil presque aussi transparent que l'espace qu'elles décrivent, ou avec des matériaux familiers devenus magiques parce que réimaginés, ses oeuvres d'art parlent de lumière, de mouvement et de sensations viscérales – un langage souterrain né d'une considération attentive/compréhension approfondie de l'environnement dans lequel il se situe.
Elle a eu trois expositions solo chez Pierre-François Ouellette art contemporain (2002, 2005, 2008), à la Fonderie Darling, Montréal (2006); à Oakville Galleries, Ontario (2003), à la Southern Alberta Art Gallery, Lethbridge (2001) et chez Optica, Montréal (1996). Son travail a aussi fait partie de nombreuses expositions de groupe au Canada, entre autres, au Musée de Rimouski, à la La Manif, Québec (1999), ainsi qu'au Musée des beaux-arts du Canada (2007), au Musée national des beaux-arts du Québec (2010, 2004) et au Musée d'art contemporain de Montréal (1997), des institutions qui ont tous acquises son travail. En 2010 a été nommée finaliste pour le Prix Louis-Comtois. Elle participera à la Biennale de Montréal en mai 2011, ayant fait partie de l'édition inaugurale en 1998.